Penne rigate, sauce à la saucisse toscane & fenouil sauvage

À peine la porte franchie, il sentit l’odeur. Cette odeur que l’on ne retrouve nulle part ailleurs : un mélange de cire ancienne, de romarin séché et de quelque chose d’invisible mais familier — peut-être l’amour en suspension. Dans la cuisine de Menton, baignée d’une lumière douce, elle s’affairait.

Il s’assit, regardant autour de lui. Les tableaux accrochés aux murs depuis toujours lui apparurent soudain neufs. Ou bien c’était lui, le regard changé par les années. Sa mère avait 85 ans, le dos un peu voûté, les gestes plus lents. Et pourtant, elle dégageait la même force tranquille que dans ses souvenirs d’enfance. Lui en avait 60, le cœur en désordre, perdu dans un monde professionnel qu’il ne comprenait plus.

« Tu veux un peu de vin ? »

Elle n’attendait pas vraiment la réponse. Déjà, l’ail crépitait dans l’huile chaude. La saucisse toscane, émiettée à la main, embaumait la pièce. Elle ajouta le fenouil sauvage — « comme faisait ma nonna » — puis le vin rouge, les tomates pelées. Il ferma les yeux. Il avait faim d’autre chose que de nourriture. Il avait faim de simplicité, de racines, de cette main posée sans bruit sur sa nuque quand il doutait trop fort.

Ils mangèrent en silence, quelques mots échappés ici et là, comme des miettes d’intimité. Les penne rigate al dente baignaient dans une sauce généreuse, rustique, ancrée. Il sourit malgré lui. Elle ne disait rien d’essentiel, mais elle disait tout. La cuisine, leur cuisine, faisait le reste.

En partant, il l’embrassa sur la joue, plus longuement que d’habitude.

« Ciao Mamma. Je t’appelle. »